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Comprendre le stress

Personne qui stresse

Avec la multitude de sollicitations incessantes auxquelles nous sommes soumis aujourd’hui, le stress est partout. A en croire la presse, le travail, les transports, les loisirs et même la vie de famille seraient des sources de stress inépuisables.

Mais qu’est-ce au juste que le stress ? Quels sont ses effets sur l’organisme ? Est-il toujours néfaste ? C’est à toutes ces questions que je vais tenter de répondre dans cet article !

Qu’est-ce que le stress ?

Le stress est un phénomène complexe qui correspond à toute condition perturbant l’équilibre physiologique et psychologique. Il est provoqué par un stresseur, qui peut-être un stimulus interne ou externe, d’origine physiologique, psychologique ou environnementale. En réaction à ce stresseur l’organisme va mettre en place un ensemble de processus pour tenter de retrouver l’équilibre. Ce phénomène d’adaptation comporte plusieurs étapes successives1 :

  1. La phase d’alarme. Période où l’organisme est mis en présence du stresseur.
  2. La réaction ou phase de résistance. L’organisme tente de s’adapter.
  3. La résolution ou phase d’adaptation ou d’épuisement. L’adaptation au stresseur peut être un succès (retour de l’organisme à un certain équilibre) ou un échec (persistance du stresseur et de l’état de stress).

En outre, le stress peut prendre plusieurs formes en fonction de sa durée et de sa fréquence :

  • Les différents types de stressLe stress aigu (ou ponctuel). C’est la forme la plus courante de stress, pas nécessairement néfaste à petite dose. L’effet est ici à court terme.
  • Le stress aigu épisodique (ou tolérable). Celui-ci est récurrent et concerne une tâche ou un type de situation où l’individu a essuyé des échecs. Cela provoque l’irritation, le pessimisme, l’anxiété et la démotivation.
  • Le stress chronique (ou toxique). Ici, les effets sont durables au niveau physique et émotionnel. Ce type de stress est souvent en rapport avec un évènement traumatique. Il peut mener au burnout et à la dépression.

Le stress peut aussi être positif

Tout stress n’est cependant pas nécessairement négatif3. On distingue ainsi le stress négatif ou “distress” du stress positif appelé “eustress“.

Le stress dit “positif” (c’est-à-dire bénéfique voire perçu comme agréable) peut représenter une source de motivation importante dans certaines situations4. De même, certains stimuli entraînant de l’eustress peuvent mener à une expérience de flux. Le flux ou “flow” est un état mental positif ressenti lorsqu’on apprécie tout particulièrement un certain type d’activité qui recèle pourtant un niveau de difficulté important5.

Le stress négatif s’accompagne quant à lui de sensations désagréables et se traduit souvent par un sentiment de détresse capable de provoquer une désadaptation. Sous cet aspect le stress correspond alors à une difficulté de l’organisme à faire face à une situation, et peut avoir des conséquences négatives sur notre comportement, nos émotions et notre santé.

Distress et eustress

Pour bien comprendre l’ambivalence du stress, on peut utiliser la représentation ci-dessous. Plus la tâche est exigeante par rapport aux capacités de l’individu, et plus on risque de tomber dans la frustration ou l’anxiété. Au contraire, si l’évènement qui se produit est bien en-deçà de notre seuil de tolérance, on risque l’ennui (absence d’intérêt ou de motivation). En revanche, quand la source de stress ou le challenge correspondent à peu près à nos capacités ou compétences, cela peut-être très stimulant.

Situer le stress positifAinsi, le stress doit être présent dans des proportions raisonnables pour garder son aspect positif. Bien entendu, il faut également que sa durée et sa fréquence soient suffisamment modérées afin de ne pas passer d’un stress aigu à un stress épisodique.

Nous voyons donc ici que le seul stress pouvant être positif est le stress aigu (ou stress ponctuel), qui est limité à un domaine particulier et circonscrit dans le temps. Tout stress récurrent ou systématique va nécessairement être négatif et avoir des conséquences plus ou moins lourdes sur l’état mental et physiologique d’un individu.

Les effets du stress sur le corps

Maintenant que le concept de stress est un peu plus clair, intéressons-nous à ses effets sur l’organisme.

Au niveau physiologique, le stress a un effet direct sur le système nerveux autonome (SNA), chargé de la coordination et de la régulation des fonctions vitales de l’organisme. Le SNA correspond au réseau de nerfs qui parcourt les organes. Il est lui-même constitué des systèmes sympathique et parasympathique. Selon les cas, ces deux sous-systèmes peuvent agir conjointement, de manière antagoniste, ou encore sur des fonctions différentes d’un même organe :

  • Le système nerveux sympathique. Il incite les organes à produire plus d’énergie et confère à l’organisme et aux muscles une plus grande réactivité. Dans les cas de stress, il prépare l’organisme à l’attaque ou à la fuite. La stimulation du système sympathique entraîne une hausse de la pression artérielle, une accélération du rythme cardiaque, une diffusion du sang vers les muscles préposés au mouvement et une augmentation du tonus musculaire.
  • Le système nerveux parasympathique. Il est actif de manière importante pendant les états de sommeil ou de repos. Sa fonction globale consiste à maintenir l’organisme dans des conditions de fonctionnement optimales. Le système parasympathique, lorsqu’il est stimulé, va entraîner un ralentissement du rythme cardiaque et de la fréquence respiratoire, une diminution du tonus musculaire et une déviation du flux sanguin vers l’appareil digestif.

Via son effet sur le SNA, le stress épisodique ou chronique peut donc provoquer l’apparition de troubles psychophysiologiques. Cela regroupe l’état de stress post-traumatique, l’anxiété, la dépression, des troubles alimentaires, l’insomnie, des problèmes cardiaques, une déficience du système immunitaire, l’obésité, etc.2.

Mais pour comprendre plus précisément la mécanique du stress et ses possibles effets à long terme il faut également s’intéresser à ses effets sur le cerveau.

Stress et cerveau

Nous l’avons vu, le stress n’est pas nécessairement négatif. En effet, sous sa forme aiguë et ponctuelle, il a toujours été au centre de nos réactions de survie et, par extension, de nos réactions d’hypervigilance et d’excellence. En revanche, le stress chronique active au long cours certaines zones du cerveau et conduit à l’épuisement de notre système de défense et de survie.

Le cerveau est d’ailleurs l’organe central du stress et de l’adaptation aux stresseurs sociaux et physiques. Il détermine ce qui est menaçant et le mémorise. Il régule également les réponses physiologiques et comportementales face aux stimuli jugés dangereux.

Tout stress entraîne ainsi une adaptation appelée allostasie. Celle-ci correspond au processus actif d’adaptation aux stresseurs via des médiateurs comme le cortisol, le système immunitaire, le système métabolique et le SNA, qui agissent ensemble pour maintenir l’homéostasie (état d’équilibre du corps).

Charge et surcharge allostatiques

Cerveau et stressLe fait d’être exposé à de multiples stresseurs peut entraîner une perturbation importante des interactions entre différentes zones du cerveau et provoquer une usure à moyen-terme. On parle alors de charge voire de surcharge allostatique pour désigner l’effet négatif d’une réponse de stress activée de manière chronique. Ceci se produit quand le cerveau est incapable de gérer ce stress et de revenir à l’équilibre.

La charge allostatique correspond à l’effet cumulatif de multiples stresseurs et la dérégulation de certains systèmes de notre organisme. C’est le stress épisodique.

La surcharge allostatique correspond au stade supérieur où ces dérégulations deviennent chroniques. Cela correspond bien entendu au stress chronique que nous avons détaillé un peu plus tôt.

Ainsi, une quantité excessive de stress va modifier l’architecture neuronale du cerveau. Les trois zones principalement en jeu dans les réponses de stress sont l’hippocampe, l’amygdale  et le cortex préfrontal6. Intéressons-nous en détail à chacune de ces zones pour mieux comprendre le fonctionnement du stress.

Effets sur l’hippocampe

L’hippocampe participe à la régulation de l’humeur, à l’acquisition des connaissances et, de façon plus générale, à l’adaptation d’un individu à son environnement.

Quand le stress perturbe le fonctionnement de l’hippocampe, des problèmes cognitifs, des problèmes d’humeur ainsi qu’une dégradation des compétences sociales peuvent survenir7. La mémoire, la concentration et les capacités d’apprentissage peuvent également être perturbées suite à la réduction du volume de l’hippocampe consécutive à un stress chronique.

Le stress aigu ou ponctuel peut à lui seul générer des problèmes de communication entre neurones dans cette zone du cerveau. Si le stress est plus récurrent ou durable, la production de nouveaux neurones dans l’hippocampe peut être arrêtée. Les neurones fraîchement créés peuvent également être détruits. On devient alors plus sensible au stress, et cela restreint notre capacité à acquérir de nouvelles informations, tout en augmentant l’intensité des réponses émotionnelles, alors plus difficiles à réguler6. Un véritable cercle vicieux se met en place.

Effets sur l’amygdale

Cette petite structure située près de l’hippocampe joue un rôle essentiel dans la reconnaissance et la gestion des émotions, et plus particulièrement la peur et l’anxiété. C’est le siège de nos émotions les plus primitives, et il dispose de connexions directes à de nombreuses autres zones du cerveau. L’action amygdalienne a donc un rôle de survie car c’est elle qui nous fait réagir en une fraction de seconde suite à la perception d’un stimulus menaçant.

Un stress aigu peut fortement renforcer les connexions au sein de l’amygdale, et cet effet est plus prononcé encore lorsque le stress est chronique6. L’amygdale devient alors plus réactive, ce qui peut provoquer une plus grande sensibilité aux stresseurs et peut se traduire par les symptômes suivants : agitation anxieuse, irritabilité, hypervigilance, réactions de sidération fréquentes. Pour faire simple, on perd plus facilement le contrôle face au stress lorsque l’amygdale voit ses connexions renforcées.

Effets sur le cortex préfrontal

A l’inverse de l’hippocampe et de l’amygdale qui gèrent les comportements liés aux émotions, le cortex préfrontal est en charge de nos capacités de raisonnement, d’analyse, de planification et d’autorégulation.

Suite à un stress chronique, le cortex préfrontal peut devenir moins actif voire réduire de volume. Ceci entraîne une perte de flexibilité cognitive et des problèmes pour s’adapter aisément à des situations stressantes. Ce ralentissement empêche le cortex préfrontal de contrecarrer facilement certaines réactions émotionnelles, notamment face à une région amygdalienne devenue hyperactive.

Des effets importants, mais réversibles !

Rassurez-vous : si ces effets sont bien réels et peuvent s’installer dans la durée, ils ne sont pas irréversibles ! Il est en effet possible de mettre en place des stratégies qui vont rééquilibrer le fonctionnement de l’hippocampe, de l’amygdale et du cortex préfrontal. De même, il est toujours possible de générer de nouveaux neurones à l’âge adulte pour compenser d’éventuels dégâts liés au stress !

Conclusion

Le stress n’est pas toujours une mauvaise chose. Comme souvent, tout est une question de juste mesure ! Il doit simplement rester ponctuel et nous inciter à sortir de notre zone de confort, sans pour autant nous submerger. Si les effets délétères d’un stress répété sont observables au niveau cérébral, cela n’est pas pour autant irréversible.

Dans un autre billet du blog, j’aborde la gestion psychologique du stress qui représente une des nombreuses approches pour le réguler. Bien entendu, l’activité physique, la relaxation et la méditation constituent d’autres outils efficaces pour réduire le stress négatif au quotidien. N’hésitez pas à explorer plusieurs pistes et à voir ce qui fonctionne le mieux pour vous !

Références

  1. Selye H. The stress of life. Rev. ed. New York: McGraw-Hill; 1978. 515 p. (McGraw-Hill paperbacks).
  2. Alvord MK, Davidson KW, Kelly JF, McGuiness KM, Tovian S. Understanding chronic stress [Internet]. American Psychological Association; [cited 2017 Dec 7]. Available from: https://www.apa.org/helpcenter/understanding-chronic-stress.aspx
  3. Selye H. Stress without distress. 1st ed. Philadelphia: Lippincott; 1974. 171 p.
  4. Bruce SP. Recognizing stress and avoiding burnout. Curr Pharm Teach Learn. 2009 Aug;1(1):57–64.
  5. Heckhausen J, Heckhausen H, editors. Motivation and action. First paperback edition. Cambridge: Cambridge University Press; 2010. 518 p.
  6. McEwen BS, Bowles NP, Gray JD, Hill MN, Hunter RG, Karatsoreos IN, et al. Mechanisms of stress in the brain. Nat Neurosci. 2015 Sep 25;18(10):1353–63.
  7. van der Kooij MA, Fantin M, Rejmak E, Grosse J, Zanoletti O, Fournier C, et al. Role for MMP-9 in stress-induced downregulation of nectin-3 in hippocampal CA1 and associated behavioural alterations. Nat Commun. 2014 Sep 18;5:4995.
Bastien Wagener
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Bastien Wagener

Docteur en psychologie, je suis passionné à la fois par le développement personnel, mais aussi par la recherche sur les capacités et potentialités incroyables de l’être humain !
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Tareau Joëlle
Tareau Joëlle
2 années plus tôt

Bonjour, merci pour votre article très fourni et intéressant. Je souhaiterais utiliser l’image intitulée cerveau et stress pour illustrer un article que je viens d’écrire. Cela vous dérange t-il?

Aperçu du livre "Plus efficace & plus heureux" avec commentaires

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