Contrairement à une idée largement répandue, la créativité n’est pas un don réservé à quelques heureux élus, ou un processus qui ne peut s’exprimer que dans les arts. Nous sommes bien au contraire tous capables de créativité. Cependant, comme pour n’importe quelle compétence, c’est en pratiquant que l’on développe pleinement son potentiel.
De plus, la créativité s’exprime autant lorsque l’on compose un morceau de musique que quand on écrit un programme informatique, qu’on organise un événement ou qu’on décore son appartement. Dès qu’il n’existe pas de solution unique pour résoudre un problème, il y a de la place pour la créativité !
Une disposition mentale particulière
Le prérequis pour être pleinement créatif est de séparer la phase de génération d’idées de la phase de sélection des idées. Vouloir imaginer toutes les solutions possibles en les triant au fur et à mesure n’aboutira qu’à une seule chose : l’étouffement de la créativité. Faire les deux choses à la fois, c’est appuyer sur l’accélérateur et sur la pédale de frein en même temps. En procédant de la sorte, on aura tendance à juger sévèrement et rapidement les idées nouvelles, ce qui va limiter le nombre d’idées produites. On restera alors dans des choses connues, dans une zone de familiarité. Or, plus on a d’idées, et plus on est susceptible d’avoir une bonne idée ou une idée vraiment originale !
Pour soutenir le processus créatif, on va donc séparer le travail en deux temps :
- Une phase de pensée divergente. Ici, on suspend le jugement et on cherche à générer des idées en quantité, tout en cherchant des choses inédites ou des combinaisons d’idées originales.
- Une phase de pensée convergente. Une fois la matière première produite, on va la filtrer en appliquant un jugement positif et constructif sur chaque idée produite. Il s’agit de trouver les éléments les plus intéressants pour répondre à l’objectif que l’on s’est fixé.
Au-delà de ce principe, on peut employer des méthodes et techniques complètes qui vont directement favoriser le processus créatif. Lorsque l’on fait face à des problèmes complexes ou à des projets, il est intéressant d’utiliser la méthodologie du “Creative Problem Solving” (CPS). Voyons en quoi consiste cette méthode.
La résolution créative de problèmes ou “Creative Problem Solving” (CPS)
Cette méthode développée à l’origine par Alex Osborn (le “père” du brainstorming) et Sidney Parnes a été depuis affinée par Gerard Puccio et ses équipes. L’objectif de cette méthode est d’employer une méthodologie dynamique et circulaire pour résoudre des problèmes de manière créative.
Le CPS se découpe en 3 étapes, plus une étape centrale d’identification du problème à traiter. Les 3 étapes principales se découpent elles-mêmes en sous-étapes, comportant chacune une étape divergente et une étape convergente. Pour un résumé de la méthode, référez-vous au schéma global proposé un peu plus bas dans cet article. Voyons maintenant comment tout cela fonctionne.
Étape préliminaire : évaluer la situation
Cette étape sert à identifier un problème à traiter puis à récolter des données sur celui-ci. On va donc récolter un maximum d’informations sur le problème choisi afin de connaître les forces en présence (acteurs, ressources, contexte, intuitions, perceptions, etc.).
Une fois les données recueillies on va les trier pour faire ressortir les éléments les plus importants et ainsi définir l’espace-problème. On peut alors décider où continuer dans le processus créatif de résolution de problèmes. En fonction des situations et des besoins, on peut en effet sauter une ou plusieurs sous-étapes. A chaque fois que l’on a un doute, on revient à cette étape centrale de définition du problème. Sans problème à résoudre, difficile de canaliser l’énergie créative.
Étape 1 : clarification
Cette étape est pertinente lorsqu’on a besoin de clarifier l’objectif ou le défi créatif choisi. Si celui-ci est déjà limpide, on peut directement passer à la suite.
Si au contraire les choses manquent de clarté, on cherchera à explorer la vision pour ensuite identifier les défis à relever. La phase de clarification sert à explorer les problèmes, écarts, souhaits ou objectifs à considérer pour être en mesure de sélectionner le défi le plus pertinent.
1.a – Explorer la vision
Pour commencer on va générer toutes les visions et souhaits possibles. On sélectionne ensuite une ou plusieurs visions qui sont motivantes, requièrent de l’imagination, et sur lesquelles on peut prendre les décisions. Le but est ici d’identifier une vision du futur (but qui décrit l’état désiré par rapport à la situation actuelle) à partir de l’espace-problème défini au préalable.
La phase divergente consistera à identifier de nombreux “futurs possibles” en formulant des phrases commençant par exemple par : « ça serait bien si… », « j’aimerais que… ».
On va ensuite faire converger ses idées en choisissant une vision qui vaut le coup parmi celles générées. A la fin de cette étape on dispose donc une vision claire exprimée comme un but affirmatif.
1.b – Formuler des défis
A partir de notre vision, on va générer un maximum de défis ou de “problèmes” qui pourraient se poser.
D’abord, avec la pensée divergente, on identifie les problèmes critiques qui doivent être traités et résolus, les écarts entre le présent et la vision choisie ainsi que les chemins possibles pour y arriver à ses fins. Pour générer ces défis, on peut se poser des questions commençant avec les amorces suivantes : « Comment faire pour… ? », « Comment pourrait-on… ? », « Qu’est-ce qui pourrait… ? », « De quelles manières cela pourrait… ? ».
Dans un deuxième temps, on pense de manière convergente pour donner forme à ces défis et les reformulant. A la fin de l’étape, on sélectionne donc le ou les défis les plus importants (et orientés vers l’action).
Étape 2 : transformation ou idéation
Une fois le problème clairement défini, on peut enfin chercher des idées pour le résoudre. On va donc chercher comment réaliser notre vision grâce à des solutions viables.
2.a – Explorer les idées
C’est à ce moment que l’on va utiliser des techniques tel le brainstorming pour trouver un maximum d’idées. Ici, pas question de se restreindre : on génère autant d’idées que possible de manière ouverte, voire joueuse. Peu importe qu’une partie d’entre elles soient farfelues ou irréalisables : on en jugera plus tard. De plus, certaines “parties” d’idées à priori farfelues peuvent parfois donner des choses très intéressantes une fois combinées à d’autres idées plus terre à terre.
Fixez-vous comme objectif de générer au moins 40 à 50 idées. Les 10 ou 15 premières seront les idées évidentes (zone de familiarité), et les suivantes seront beaucoup plus intéressantes et inédites. Si vous ne cherchez que 10 idées, vous ne sortirez pas de votre manière habituelle d’envisager les choses (cf. premier schéma de cet article).
Une fois que vous aurez atteint votre “quota” d’idées, vous pourrez sélectionner les idées les plus prometteuses (phase de convergence). Les idées sélectionnées doivent être à la fois nouvelles et utiles. Celles-ci devront alors être développées et transformées en solutions.
2.b – Formuler des solutions
Les idées, aussi intéressantes soient-elles, ne sont pas des solutions. Il faut donc commencer par évaluer les idées retenues de plusieurs manières :
- Quels sont les “plus” et les “moins” de l’idée ?
- Quelles sont ses potentialités ?
- Comment faire pour dépasser ses inconvénients et renforcer ses avantages ?
- …
Dans un deuxième temps, on va prendre des décisions sur chaque aspect de la solution émergente, en poussant plus loin son développement. Veillez à éviter de clôturer hâtivement cette étape. Il s’agit de “ciseler” les idées retenues et de les combiner pour obtenir une solution viable et pertinente.
Au final, on obtiendra une solution robuste pour laquelle on se sent engagé et sur laquelle on peut vraiment travailler. On disposera donc une solution implémentable.
Étape 3 : implémentation
Dans cette dernière étape, on cherche à développer un plan d’action qui s’insérera aisément dans l’environnement ciblé. On va donc affiner la solution choisie pour qu’elle soit adaptée à la réalité du terrain.
3.a – Explorer l’acceptation
Tout problème existe dans un environnement donné. Il faut donc évaluer le contexte dans lequel la solution choisie sera implémentée. A cette étape, on identifie les sources d’assistance et de résistance.
Lors de la phase divergente, on identifie toutes les personnes et ressources qui peuvent nous assister. On réfléchira également à la manière d’exploiter au mieux ces ressources. Le même travail devra être fait sur les sources de résistance. Une fois celles-ci identifiées, on cherchera toutes les manières de mitiger ou de dépasser ces problèmes.
La phase de convergence consistera enfin à identifier les soutiens et les freins qui nécessitent prioritairement notre attention.
A la fin de l’étape, on disposera de tactiques pour traiter l’assistance et la résistance. Tout ceci devra être incorporé au plan d’implémentation pour faciliter la mise en place de la solution retenue.
3.b – Formuler un plan
Pour implémenter le projet avec succès il faut disposer d’un plan précis. Il s’agit donc d’être tactique et d’identifier ce qu’il y a à faire. Néanmoins, cette étape est parfois un travail d’équilibriste, car il faut rester conscient que tout changement créatif comporte des risques et une part d’incertitude.
Lors de la phase divergente, on cherchera à identifier toutes les étapes requises pour implémenter la solution choisie (ce qui doit être fait, quand et par qui).
Lors de la phase convergente, on organisera ces étapes en un plan d’implémentation exhaustif, dont la structure sera déterminée par le type de projet.
Une fois ce travail réalisé, vous serez prêt à implémenter votre solution créative ! Notez qu’un autre article du blog vous propose deux outils pour travailler cette phase du CPS.
Conclusion
Chacun de nous possède donc des capacités créatives, mais encore faut-il comprendre comment les solliciter ! Mais heureusement, ceci est à la portée de tout un chacun, quels que soit votre domaine de prédilection. Il n’y a pas non plus de personnes ou de personnalités créatives ou non créatives. Tout le monde possède cette capacité créative. C’est en séparant bien la phase de divergence (génération d’idées) de la phase de convergence (esprit critique, jugement et sélection) que vous libérerez votre créativité.
C’est en effet le fait de vouloir être créatif et critique en même temps qui assèche la créativité de la plupart des gens. Au fil des années et de notre scolarité, nous apprenons à censurer nos idées avant même de les avoir verbalisées. Or, pour trouver les bonnes idées, il faut laisser toutes les idées s’exprimer !
Ne vous bridez donc pas : laissez toutes les idées sortir et amusez-vous ! C’est de cette manière que vous pourrez trouver les meilleures idées pour réaliser tous vos projets !
Merci d’être passé(e) sur le site et d’avoir pris le temps de lire cet article ! J’espère que vous l’avez apprécié.
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Bonjour, merci pour cet article que j’ai lu avec grand intérêt.
Est-ce que, selon vous, ces techniques s’appliquent à la composition musicale ? Domaine où je n’ai pas forcément un “problème” initial à résoudre, mais plutôt un souhait artistique de quelque chose que je souhaite exprimer et de trouver les moyens (composition / instruments / arrangement musical …) qui l’expriment le mieux.
Merci à vous.
Christophe
Bonjour Christophe et merci pour ce commentaire ! Oui, le processus créatif peut s’appliquer à n’importe quel “problème”, de l’optimisation de réunions à la création artistique. Le timing sera sans doute différent dans ce dernier cas, surtout lorsqu’on aborde la composition à proprement parler (la production de “propositions” peut être plus lente dans ce cas par rapport au fait de simplement noter des idées). Le tout à mon avis est de travailler en séquences, par exemple en séparant la génération d’idées de compositions ou de lignes mélodiques de celle du choix des instruments, puis des arrangements. Vous pouvez aussi passer par une phase plus “théorique” pour explorer les types d’arrangements et instruments qui vous paraissent le mieux répondre à votre… Voir plus »